Les arts martiaux chinois étaient à l’origine des techniques de combats transmises par des maîtres initiés auprès de médecins et de moines taoïstes et bouddhistes.
Dans leurs essences, ils intègrent totalement ce qui a été exposé précédemment.
Par contre, lorsque ces arts furent importés au Japon, ils se mêlèrent à une culture imprégnée à la fois par le shintoïsme, religion nationale et par l’esprit des samouraïs. Enrichis par ces deux aspects de la culture japonaise, les maîtres d’arts martiaux ont perfectionné des arts de guerre qui sont devenus par temps de paix les voies du Budo, lieux d’apprentissage de soi, de l’autre et de la relation.
Associer l’art à la guerre peut sembler surprenant et contradictoire mais tout s’éclaire lorsque l’on réintègre ces arts dans leur contexte culturel chinois puis japonais.
Le Japon, avant l’arrivée du bouddhisme zen, était shintoïste. Du shintoïsme, nous retiendrons qu’il demandait aux samouraïs de vénérer et de servir leur empereur jusqu’à la mort. Le samouraï apprenait à défendre sa vie et son honneur dans des écoles de combat. Avec le temps et la paix, les salles d’armes sont devenues des dojos, des lieux d’apprentissage de la voie d’un autre combat : de soi à soi dans la relation. Cette conception pacifiste des arts martiaux, diffusée par le Karaté, le Judo, et surtout l’Aïkido, est récente (après la seconde guerre mondiale) et occidentale.
Les rites, entendus comme la répétition de gestes normés, sont des repères individuels d’observation des fluctuations de l’espace-temps.
Le pratiquant, par la répétition de gestes codifiés, affine progressivement la perception de ses sensations, de ses mouvements et, par conséquent, développe la perception des rythmes de l’autre et co-émergeant de la relation. La ritualisation est une activité d’apprentissage de la relation. Au même titre que le méditant ou le médecin chinois, le pratiquant d’arts martiaux, en accomplissant ces gestes codifiés dans un état de concentration, de détachement émotionnel et mental suffisant, se laisse envahir par sympathie des rythmes du partenaire, entendus, encore une fois, comme des alternances multiples de pleins et de vides, pour enfin accomplir le geste juste qui originellement tuait.
Nous devons enfin aborder un dernier point, celui de l’intérêt d’apprendre à faire la guerre. Apprendre à faire la guerre, objectif des arts martiaux contemporains est à comprendre comme une méthode de gestion des conflits relationnels. En effet, parce qu’ils proposent des espaces où le conflit peut être vécu, intégré, ou encore accepté, les arts martiaux sont des méthodes de résolution de ce dernier.
Les arts martiaux orientaux incarnent une vision de la relation héritée de plus de 2000 ans d’histoire qui intègre la corporéité dans une dimension relationnelle primordiale au combat.
Jean-Luc LAMBERT
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